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  • Photo du rédacteurDanette

Jonathan, le baby-sitter (Cinquième Partie) :

Dernière mise à jour : 23 mai 2020


RECONSTRUIRE


Il existe des puzzles simples pour enfant et puis il y a ceux à 100 pièces et plus. Enfin le mien ressemblait plus à un puzzle en 3D ou même 4D. La dimension familiale et logistique, la dimension économique et professionnelle, la dimension sensuelle et émotionnelle auquel s’ajoutait une dimension temporelle. Tout me paressait faisable mais il y avait une contrainte d’ordre spatio-temporelle.



Ce n’était pas simplement un agenda à mettre en place, l’ordre dans lequel se faisaient les choses, la façon dont elle se déroulerait déterminerait les étapes suivantes. Mais du temps nous n’en avions pour ainsi dire pas. Et surtout pas à perdre maintenant dans le cas où Jonathan puisse avoir besoin de moi dans 3 jours.


Ce qui au départ était simple – un diner avec mon épouse pour faire le point sur notre couple et Benji – devenait quelque peu compliqué avec la composante Jonathan. Ma parole contre le reste des principes de vie venant d’une éducation judéo-chrétienne et d’une société occidentale dont le moteur s’emballe.


Matériellement d’abord, j’avais une aisance financière qui me permettait facilement d’assumer ma parole d’homme. Il était facile de lui laisser une pièce et d’aménager une chambre. Dans un premier temps le faire dormir avec Benjamin lorsqu’il serait là rendrait même les gamins heureux. Mais, je voulais lui donner une bonne leçon et donc je voulais m’amuser un peu avec lui. Après tout, ce n’est pas tous les jours que l’on a un jeune de vingt ans que l’on peut soumettre à l’école de la vie et ses moindres désirs. Mais n’apprendrons nous pas ensemble encore de la vie ? ….


Phase 1 : Encercler l’Ennemi.

« Je peux y aller ? » me demanda Jonathan, d’une voix à peine audible.

N’obtenant de moi qu’un profond soupir, Jonathan se leva et se dirigea, tel un zombie, vers la porte d’entrée. Le gamin n’avait pas un physique désagréable – loin s’en faut – il était harmonieux, élancé même si cela semblait un peu fragile. Cette fragilité qui tenait dans le fait qu il avait un regard de chien battu à faire battre tous les cœurs de Papa. Il fallut que je prenne énormément sur moi pour ne pas le rassurer et le consoler encore une fois.

« Attends que je te le dise stp » dis-je.

« Euh Non mais … »

« Tu n’oublies rien ? »

« Euh … »

« C’est moi peut – être qui vais m’occuper du lit de Benji ? C’est moi qui dois mettre les draps au sale et refaire son lit ?

« Oh ! Pardon, je fais n’importe quoi …. Je peux y aller ? »

« Voilà ! N’attends pas plus que l’odeur de pipi ne s’installe. Celui de Benji est supportable mais le tien est celui d’un jeune mâle qui marque son territoire et j’ai peur que ça s’incruste …. »


Ce petit jeu, pour l’instant unilatéral m’amusait follement mais je devais me calmer et prendre en compte la détresse de Jonathan. L’idée était de jouer sans l’humilier d’avantage et de lui donner des armes pour la vie, pas de le détruire ….

Se faisant, Jonathan posa ses deux sacs, et commença à se diriger vers la chambre de Benji … Ça devenait trop facile, presque du sadisme à l’état pur …

« Il n’y a rien qui te choque ? » lui dis-je d’un ton réprobateur … Je voyais bien, à son regard perdu, qu’il était paumé ….Pauvre gosse …. Je suis horriblement joueur ….

« Tu veux refaire un lit en baskets et doudoune. D’abord que fais-tu en plein été avec ça ? »

« Je n’ai trouvé que ça dans ma placard avant de partir. Je suis nul … pardon … »

Jonathan enleva son anorak et ses baskets ….`

« Bob l’éponge ? » dis – je réellement étonné et amusé « Tu as des chaussettes Bob l’Eponge ! A vingt ans, tu portes des chaussettes Bob l’Eponge ? »

Jonathan ne releva pas ma remarque et se rendit, tête basse, dans la chambre de Benji. Je ne voulais pas trop l’assaillir, le but final étant de lui offrir un foyer réconfortant, aussi décidais-je de rester dans mon coin salon à consulter mes mails en l’attendant.

Cela faisait 5 bonnes minutes que Jonathan était parti refaire le lit de Benji. Je me décidais à le sonder.

« Tu as prévu quoi du coup ces jours prochains ? »

« Je vais vider mon studio »

« Tu as beaucoup d’affaires ? »

« Des Bds, des bouquins et polycopiés de médecines, ma télé, ma Xbox, des fringues et mon ordi portable que, lui, je vais garder. »

« Tu ne gardes pas tout ? »

« Et tu veux que j’en fasse quoi ? Je vais me faire de l’argent. Ça va me permettre de souffler une semaine. Je vais louer une chambre dans un Formule 1. J’aurai le temps de mettre un plan sur pied. »

« Tu te rappelles que tu as une dette envers moi ? »

« Oui pour cette nuit c’est ça ? J’avoue que ce n’est pas le moment …. »

« Ouais mais le hasard du calendrier veut que j’ai besoin de toi aujourd’hui et demain …. Donc tu n’as pas trop le choix en fait»

Jonathan terminait de positionner le drap housse propre Toy Story sur le lit de Benji. Mon regard était attiré par une feuille de papier, posée sur le bureau de Benji. Je tentai de m’en approcher. Jonathan s’en aperçu.

« Non, s’il te plait, c’est entre lui et moi …. »

« En temps normal, j’aurais joué le jeu, mais vu ton état mental depuis hier, c’est hors de question … Comprends moi ; Benji est encore jeune …. »

Je sentais bien que je contrariais Jonathan mais je voulais m’assurer que mon fils ne soit bouleversé inutilement.

« Petit Frère, des fois les grands doivent faire des choses qu’elles ne veulent pas faire. C’est exactement mon cas. Je vais être obligé de ne plus te voir pendant un très long moment.

Tu es un petit frère génial. Je t’aime très fort. Ton grand Frère Jonathan ».

Je repliai la feuille en quatre.

« Tu as écris ça quand » ?

« Tout à l’heure, juste avant de commencer le lit de Benji »

Sans le vouloir, Jonathan venait de me donner l’occasion de le martyriser un peu.

« Et bien Maintenant on sait pourquoi tu mets un temps pas possible à refaire un lit. Aller, dépêches toi un peu. Et quand tu auras finis, rejoins moi au salon … »

Il fallut 10 bonnes minutes à Jonathan pour finir le lit et porter les draps mouillés de la nuit dans la petite buanderie que je venais de finir d’aménager dans la salle de bain. Ces dix minutes n’étaient pas perdues pour moi. Elles me permettaient de réfléchir à ma stratégie à très court terme, mais aussi à plus longue échéance. Je savais comment allait se terminer la journée et justement, un problème moral me vint à l’esprit.


A force de mettre Jonathan dans cet état de domination / soumission, je ne voulais pas que le gamin ait des gestes à caractères sexuels envers moi et si, malgré tout, les choses devaient déraper, je ne voulais pas que ce soit non consenti de sa part. C’était la limite, le mur infranchissable que je m’étais fixé. La réalité est que ce gamin m’attirait ; l’autre réalité est que s’il devait se passer quelque chose, cela ne pourrait être que ce soir. Dès demain, il serait plus que probable que Mathilde refasse partie de ma vie et que reformions avec Benji une vraie famille.


« Voilà, je pense avoir fini » me dit Jonathan en détournant son regard de moi.

« Regarde-moi ! »

« Dis moi » poursuivis-je « Tu as les yeux rouges. Tu as encore pleuré ? »

« Oui …. »

« Qu’est ce qu’il t’arrive encore » dis-je feintant un air agacé

« Oh rien, c’est juste qu’en terminant le lit de Benji j’ai repensé à tous nos bons moments tous les trois nos balades dans les parcs d’attraction, nos fous rires à la piscine. Je me suis rappelé la seconde fois ou on avait été à EuroDisney, j’avais conditionné Benji toute la journée pour qu’il accepte de faire le Train de la Mine. Il avait la frousse. Et le soir nous y sommes allés et finalement, lorsqu’il s’est assis à côté de moi dans le wagon ça m’a fait tout drôle. J’avais l’impression, pour la première fois de ma vie, de compter pour quelqu’un. »


J’avais littéralement envie d’étrangler Jonathan. Alors que je voulais être dur et strict, lui passait son temps à me décocher des flèches en plein cœur.


« Ouais, c’était une chouette journée » J’aurai voulu poursuivre en disant que Benji et lui allaient super bien ensemble comme frères ; que oui bien évidement il était important pour Benji , que très tôt je n’emmenais plus mon fils et son baby-sitter en balade mais deux frérots inséparables. J’avais conscience que Jonathan avait besoin d’entendre toutes ces choses, mais cela aurait été, dans l’instant, totalement contre-productif et n’aurait servi qu’à refaire pleurer Jonathan. Je n’avais pas non plus le temps de dire à Jonathan que cela faisait 4 heures que je le faisais tourner en bourrique. Car, à coup sûr, j’aurai eu droit à de nouvelles larmes, des câlins interminables et nous n’avions pas du tout le temps ….


Phase 2 de mon projet machiavélique : l’Estocade !

« Bon, habille-toi. On part dans 5 minutes ! »

« On ? Je ne peux pas. Il me reste que deux jours … »

« Comme je te l’ai dit, nous disposition de quelques heures avant que Mathilde vienne diner et je vais avoir besoin d’aide. Je ne n’y suis pas préparé dans ces conditions…

Alors hop, remets tes baskets, ton anorak et on y va. Et plus tu discutes, plus on perd du temps. IL est déjà presque 11 h 30 du matin …. »


A la vue de son visage, je sentais Jonathan perplexe et peu convaincu de courir après plusieurs objectifs dont certains le concernait qu’indirectement. Et pourtant il me fallait être suffisamment convaincant pour éliminer toute résistance et composer les règles d’une famille dont il pourrait être un élément.

C’est ainsi que nous montâmes dans ma voiture. Il me restait à ventouser le Tom-tom sur le pare-brise et à y rentrer l’adresse de notre destination, adresse que Jonathan reconnue immédiatement…« Pourquoi rentres-tu mon adresse dans le GPS ? », me demanda -t- il totalement paumé ?

« C’est notre première destination. Tu as un appartement à rendre, je te rappelle. Cela ne va pas se faire tout seul ».

Après vingt minutes de route, nous arrivâmes devant l’immeuble du CROUS. La chance devait être avec nous puisque je trouvai une place pratiquement l’entrée de l’immeuble. Il ne nous restait plus qu’à entrer dans l’immeuble, vider les affaires de Jonathan et passer à la suite. Alors que nous traversions le hall une voix nous interpellait.

« M. Dompart, pouvez-vous venir me voir ? »

Je me retournai vers Jonathan qui me susurra à l’oreille « Et merde, c’est le responsable administratif et financier … »

Nous nous dirigeâmes vers le bureau de notre interlocuteur. J’avais un mauvais pressentiment.


« Avez – vous pris connaissance de notre courrier ? »

« Oui je dois vous rendre les clés après demain, c’est ça …. »

« Euh, en fait il y a du changement … Notre banque vient de nous faire savoir que votre père a fait une opposition à notre dernier prélèvement …. »

« Oui et donc ? »

« Avez-vous des problèmes avec votre père ? »

« Je n’ai pas envie d’en parler »

« A votre guise, quoiqu’il en soit je vais vous demander de me restituer votre clé immédiatement. »

« Euh, oui mais mes affaires ? »

« Nous les conserverons en attendant. Si vous n’avez pas soldé votre dette le mois prochain, nous commencerons une procédure de recouvrement de créance par voie d’huissier et nous jetterons le reste. »

« Euh, je peux juste récupérer une boite ? »

« Qu’y a -t-il dans cette boite ? »

« C’est mes médicaments et effets médicaux personnels dont je ne peux vous parler ici en plein milieu du Hall »

« Drogue ou stupéfiants ? »

« Non non rien d’illégal »

« Des Sex Toys ? » Jonathan, outre le fait qu’il se liquéfiait à vue et devenait rouge pivoine …

« Non … » répondit-il d’une petite voix


« Je ne peux pas vous autoriser à prendre quoique ce soit qui pourrait avoir une valeur marchande. Je dois contrôler que …. »

Tout ce cirque commençait sérieusement à m’agacer. Je décidai de prendre la main.

« Excusez-moi et Bonjour, Pierrick Lallemand, je suis un ami de Monsieur Dompart. Si je comprends bien le contrat est donc au nom de son père. Donc il suffit d’engager la procédure vis-à-vis du signataire et pour mon ami de récupérer ses affaires dans le calme et la dignité. »»

« Vous êtes son père ? »

« Non, pas tout à fait d’un point de vue administratif mais je réponds de la probité de mon ami qui a besoin de récupérer ce dont il a besoin pour le week-end. Nous reviendrons lundi pour le reste en espérant trouver là une solution à ce malentendu.

« Bien … »

« Et, il vous doit combien ? »

« Euh, il n’y a que le dernier prélèvement, plus le solde du contrat , soit 499,95 euros. Par contre la clé doit m’être rendue à 17 h ce soir ».

« Mais » reprit Jonathan « je devais avoir encore deux jours … Je dors ou moi ce soir ? »

« Chez votre ami ? » Le comptable se retourne vers moi.

Je voyais bien que Jonathan allait vouloir reprendre la parole. Je lui donnais un coup de pied sous le bureau pour l’en dissuader …

« On va faire simple car vous me faites perdre mon temps pour trois fois rien et cela me gave. » A m’entendre hausser le ton, Jonathan devenait blanc comme un mort. « Prenez ma carte bancaire, soldez le compte du gosse. Je vous rends vos clés dans 1 heure »

Le type était estomaqué par le retournement de situation. Il s’exécuta et régularisa le compte de Jonathan. Nous sortîmes de son bureau et nous dirigeâmes vers le studio de Jonathan que je découvrais pour la première fois.


« Hey » me dit Jonathan terrifié « pourquoi t’as fait ça. Tu me fous dans la merde. J’aurais pu négocier … voir l’assistante sociale pour avoir un peu de répit ….mon con de père devait assumer »

« Jonathan, tu m’engueuleras plus tard si ça te chante …. Là on va faire vite. Rassembles tout ce qui est à toi sur ton lit. On a une heure …. Je ne veux pas moisir ici. Je te l’ai dit, il faut organiser notre vie ensemble. A commencer par ce week-end parce qu’il peut conditionner tout le reste»

Pendant que Jonathan vidait la penderie, je remarquai dans le coin opposé de la pièce un carton que ma curiosité me força à ouvrir.

Il s’y trouvait des couches ce qui ne m’étonnait pas plus que cela, sinon la quantité mais en fouillant dessous je tombais sur deux biberons, trois bodys à la taille de Jonathan et une collection de tétines !

« Voyez-vous ça » dis-je amusé « En fait, le baby-sitter de mon fils a lui aussi tout le nécessaire d’un grand gamin »

« On dit ABDL… enfin j’étais. Ce n’est plus d’actualité …. »

« Tiens donc, c’est à la carte ? »

« Ben tu me vois en couche et tétine faire la manche dans le métro ? »



Intérieurement je me voyais lui répondre : Ce n’est pas que je ne te vois pas en couche et tétine faire la manche dans le métro ; C’est que je ne te vois pas faire la manche tout court ! …


« et le carton que tu tenais absolument à récupérer ?... »

« Oui c est celui-ci … j’espérai te le laisser en garde le temps que je trouve une solution ….


« Mouais … Bon accélères le mouvement. Je commence à charger la voiture … »


Après trois aller-retours entre le studio de Jonathan et le coffre de ma voiture, nous étions prêt à partir. Je pris les clés du studio et demandais à Jonathan de m’attendre dans la voiture.


Pendant que je retournai vers le bureau du comptable de l’immeuble, je réfléchissais à ce que je pouvais dire à ce fonctionnaire zélé. J’en conclu que la meilleure façon de sortir de cette situation était de ne rien dire. Le monsieur avait ses 500 euros. Il était content. Et puis Jonathan serait mieux dans un appartement dans le XVI° arrondissement.


Je rendis les clés sans desserrer les dents, tourna les talons et clôturai ainsi le chapitre « vie en résidence U » de Jonathan.


Il ne nous resterait plus qu’à rentrer chez moi, non sans passer, vu l’heure par un Mac Donald ou Jonathan voulu pour compléter son Menu Signature également un HappyMeal …. Un peu comme si Benji était parmi nous...




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