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Un neveu qui me ressemble

J’ai toujours redouté les appels téléphoniques en pleine nuit. Vous pourriez me dire de fermer mon Gsm mais cette façon de faire, ça aussi, je déteste. Il peut y avoir une urgence et si vous aimeriez que quelqu’un vous réponde alors vous devez aussi être présent pour l’urgence de l’autre…


Cet appel là bouleversa mon week-end du 11 novembre et les jours qui suivirent. A point de contrarié le week-end DL en Belgique que j’avais en point de mire sur mon calendrier. Je me réjouissais d’y retrouver des semblables et son organisateur Matthéo ( à l’heure où je réédite mes histoires Matthéo n’est plus…)

Le répondeur s’enclencha alors le temps que je sorte de ma torpeur. J’avais fait la bringue hier soir avec quelques amis au karaoké d’Ivry. Nous avons bien bu et bien que je ne sois au lit que depuis une paire d’heures, dixit le réveil, ma couche est déjà humide. Bon réflexe d’en avoir mis une en pareille circonstance. J’ai moins de scrupules lorsque je dors seul…


J’attrape à tâtons le téléphone portable qui s’agite sur le bord du lit.

«L’hôpital de Basse-Terre, Monsieur. On m’a demandé de vous prévenir. Il y a eu un drame dans votre famille. Je n’ai pas une bonne nouvelle, monsieur. Votre frère Christophe est décédé ce soir suite à un accident de plongée à Bouillante en Guadeloupe. Vous pouvez rappeler au +33549000X7 ou au +33675XXX8. Condoléances. »


Mon sang ne fait qu’un tour pendant que la voix préenregistrée me dit « vous n’avez pas d’autre nouveau message ».

Il est 6h de matin et là-bas il doit être…minuit. J’enfile le bas de mon pyjama et je reste prostré sur mon canapé.


Partie 1 : Flashback


Christophe, mon plus jeune frère avait deux ans de plus que moi. Il avait téléphoné un jour chez maman pour « faire la paix » alors que j’étais chez elle pour voir comment elle s’habituait à sa résidence retraite. Elle eut du mal à reconnaitre sa voix et pensa même à une vilaine farce. « Christophe, ton fils. Tu en as qu’un seul qui s’appelle comme ça … J’aimerais te parler… » Entendis-je lorsque j’actionnais depuis le réceptacle du combiné la fonction mains libres. Cela faisait 15 ans qu’elle ne l’avait pas vu. « Qui t’a donné ce numéro ? » finit elle par répondre.


Nous avions du obtenir l’autorisation de ses descendants pour entrer dans cette résidence et ainsi mon père et mes frangins avaient obtenu les coordonnées du standard, et lui, avait choisi d’appeler un dimanche midi à l’heure du déjeuner. J’avais vu le visage de ma mère se remplir d’anxiété. J’ai du prendre le combiné et lui demander de patienter pour qu’elle puisse s’asseoir. Depuis le haut parleur, je suivais la conversation. L’entretien était préparé mais très bien construit. Après avoir pris de ses nouvelles, il donnait des siennes et après un bref résumé de la vie de baroudeur qu’il avait eu. Après son retour en métropole entre 25 et quarante ans où il fut moniteur, animateur de centre aéré ici et là, il devint responsable et directeur de centre de loisirs et de vacances.


Il était alors directeur d’une résidence hôtelière de moyens et longs séjours pour hommes d’affaires et scientifiques en région parisienne. Un peu moins mobile pour essayer d’avoir une vie familiale…

Christophe exprima enfin sa volonté de venir voir m’man et de parler « famille ». Elle ne savait comment réagir alors j’entretenais la conversation des préoccupations du moment ; l’acclimatation avec le nouvel environnement que constituait la « résidence pour sénior » pour personnes âgées pour elle et nous en restions là. Nous redoutions que les vautours ne se rapprochent.


La semaine suivante, il rappela et demanda si nous pouvions passer Noël ensemble et …c’est ce que nous fîmes. Passées nos inquiétudes, il nous accueillit en région parisienne au noël 2007 au milieu d’une bande de copains et d’une famille à l’image de la vie « patchwork » qu’il avait choisi de mener.


Beaucoup d’émotions en peu de temps puisque ma mère apprenait qu’elle était grand-mère en retrouvant son fils et que celui-ci élevait un fils alors âgé de 12 ans et demi, Rony. Au passage je faisais, moi, connaissance avec ce neveu, un petit métis comme j’en avais fréquenté sur les bancs de l’école lors de mes jeunes années passées en Guadeloupe. Tellement la surprise était grande et les événements rapides, pour tout vous dire, nous étions venus les mains vides pour un noël…


L’année suivante nous avions remédié à cette situation en lui offrant la console de jeux qu’il souhaitait déjà avoir l’année précédente. Nous avions alors fait plus ample connaissance et avions fait l’effort de participer à toutes les occasions qui se présentaient (Pâques, Anniversaires, fêtes des pères et des grand-mères et même Halloween…). J’avais observé tout ce nouveau monde avec pour soucis de protéger maman. Nous ne savions que ce que nous aurions pu savoir mais en quelques mois je m’étais pris à un élan nostalgique et à croire que les belles années de l’enfance pouvaient ressurgir…


On ne rattrape pas le temps, on courre toujours après.


En juin dernier, Christophe nous apprenait qu’il mettait fin à son contrat de directeur de site de vacances pour un grand groupe hôtelier français et repartait en Guadeloupe pour un nouveau projet. Il était temps. Il avait selon lui fait le tour de la question et depuis ses quarante ans le démon de midi il voulait refaire sa vie, prendre un second départ.


Cela voulait dire un nouveau projet professionnel, un retour un Guadeloupe pour lequel j’avais quelques compassions et une nouvelle aventure sentimentale. Rony était en âge de se débrouiller seul. Cette fois ci il n’était pas question de le « déraciner une fois de plus » et de le faire suivre au rythme des saisons que son père faisait en hiver à la montagne et l’été dans un site balnéaire. Sa mère se chargerait de l’intendance et il avait trouvé le bon compromis. Le « gamin » ferait sport études au Crous d’Houlgate en Normandie et poursuivrait sa scolarité en parallèle de sa formation de footballeur au stade Malherbes de Caen. Sa mère habitait Rennes et son grand père aussi… Quant à nous, il était en

confiance et il nous appellerait s’il en avait envie et quoiqu’il en soit il nous ferait venir en Guadeloupe à la première occasion.


L’année qui venait de s’écouler lui avait apporté des satisfactions, les affaires prenaient. Rony obtenait la satisfaction de ses enseignants et dirigeants de son club de formation. Nous avions même passé une semaine de vacances à Dieppe cet été avec ma mère et « son » petit fils. Tout allait bien et nous envisagions sérieusement venir le voir au printemps prochain. Je préparais ma mère pour ça. Le retour en Guadeloupe serait sans doute difficile car elle y avait vécu la désagrégation de sa vie maritale, le déchirement d’avec ses enfants ainés qui avaient choisis de suivre leur « P’pa », mon père à moi, notre géniteur à Tous.


Aujourd’hui cela devenait impossible, le « drame » est sans doute un mot faible pour décrire ce qui nous arrive… Je reste prostré mais aucune larme ne trouve de source dans mon corps, tout au plus ma couche étanche un nouveau flot d’amertume. Les mots résonnent dans ma tête. Je réécoute le répondeur qui me les répète sans jamais varier. Qu’espéré-je ? A la suite une multitude de questions font embouteillage dans mon cerveau. Il me faut pourtant traiter les données une à une…Je comprends que c’est ma colère, mon inquiétude qui étouffe ma peine. La colère sur la vie et sur ce « on ». Ce doit être mon père...Il a du encore avoir la faiblesse de laisser quelqu’un d’autre appeler à sa place.


La femme au téléphone était elle de l’hôpital, était-ce sa nouvelle compagne ou quelqu’un d’autre. Elle n’avait pas d’accent. Qu’attend-on de moi ? Pourquoi si peu d’informations ? Pourquoi n’avais je pas répondu plus promptement et décroché ? Qui vais-je rappeler ? A-t-on déjà prévenu ma mère ?


Au milieu de tout ça, il y a le week-end de rencontre Dl qui est à annuler. Je devais me rendre en Belgique pour me mettre au vert avec quelques uns des membres d’Abkingdom, grande famille de personnes qui se questionnent et tentent de vivre en communauté quelques unes de leurs particularités. Certains devaient sans doute attendre des nouvelles sur mon blog. En voici écrites depuis le mini PC à bord du vol Air France vers mon île natale… Mais n’allons pas trop vite…


J’ai donc rappelé au numéro de portable qui m’a été donné mais personne ne répondait. Le numéro de téléphone fixe me permit de joindre la résidence touristique dont mon frère était gérant. Sa connaissance de la plongée était un argument supplémentaire pour lui confier le développement de ce site à proximité du plus fameux spot de la région. J’en sais plus alors. Il aurait dérivé dans les bas fonds et au prix d’un terrible effort pour revenir avec son groupe sur le bateau, il s’est fait « péter le cœur ». C’est ce que me dit sa nouvelle compagne en larmes. Elle doit être surprise de ne pas avoir les mienne en échos, il faudrait que je puise encore dans les souvenirs heureux de mon enfance ou ceux plus récent d’une famille plus unie.


« Avez vous appelé notre mère ? »

« Non, je pensais qu’elle vivait avec vous … »


Elle avait du rater des épisodes mais je ne lui en tins pas rigueur. « Ne vous inquiétez pas, je m’en charge. Je vais la voir aujourd’hui… »


Je mis encore une heure avant de trouver les ressources nécessaires pour me préparer à parcourir les 150 km et porter la mauvaise nouvelle. Je pensais la décider à venir avec moi rendre cet hommage…


Partie 2 : Rony, l’Orphelin


Je me débarrassais de ma couche trop lourde maintenant, me glissais sous une douche que je voulais froide pour me faire réagir et qui sait me réveiller de ce mauvais rêve. Il me fallut deux heures de route sous une pluie battante de fin du monde. Ce week-end du 11 novembre était épouvantable. Un très long week-end et je me répétais « la situation est déjà désespérée ne la rendons pas cataclysmique ». La pluie redoublait et mes larmes se faisaient jour tellement j’étais ailleurs que sur la route par la pensée. Je savais que j’allais devoir partager la peine avec ma mère et en réveiller une autre. Elle qui avait plein d’espoir et trouvait depuis quelques mois un regain d’existence.


Mais quand j’arrivais, je la trouvais déjà la tête défaite. Rony avait appelé à la maison, sur mon portable et pour finir avait appelé sa grand-mère. Prévenue par son autre oncle et son grand père qui était déjà en Guadeloupe… Car Christophe avait fait venir le père et notre frère pour ouvrir la « saison ». Nous devions la finir avec lui dans son esprit… Dans la dernière discussion que nous avions eu par messagerie, je devinais son souhait de réunir la famille à terme.


Ma mère s’interdisait de pleurer jusque là mais la discussion que nous devions avoir ébranla des émotions longtemps enfouies. Il lui fallait décider d’aller en Guadeloupe… Mais je ne parvenais pas à lui faire entendre raison. Je lui confiais les projets de Christophe mais ce ne pouvait être la mort qui réunisse la famille. Elle prétextait que sa santé ne le permettait pas pour ne pas dire qu’elle ne saurait affronter mon père. « Tu me représenteras et tu accompagneras Rony. Je préfère rester là… ». Malgré tous mes efforts la discussion se fermait. La dernière possibilité était de briefer Rony pour arriver àla convaincre de venir avec lui.


Le gamin appela et je devinais sa tristesse... « Maman ne veut pas venir, elle reste chez elle avec Léo, mon demi frère et Bruno, mon beau père est en mission. Elle veut que je me rende en Guadeloupe avec vous. Vous voulez bien y aller ? »

« Bien sur » m’entendis je lui répondre.

« Tu veux que je te rejoigne où ? A Paris st Lazare ? »

« Non je suis à Rouen pour soutenir ta grand-mère et essayer de la décider de venir aux obsèques mais j’ai besoin de ton concours pour la décider à voyager… »

« Ah bon déjà ? Bon bah, je peux être là dans deux heures dans ce cas. Mon professeur principal m’emmène à la gare. Je te rappelle quand je suis à 20 minutes de descendre… J’ai besoin de ma famille et elle est éparpillée…




Il rappela en début de soirée 4heures plus tard. J’étais inquiet. Il me donna comme simple excuse qu’il s’était endormi dans le train et qu’il était déjà en gare. Lorsque je le rejoignais au trouble que l’on pouvait accorder à un gamin qui vient de perdre son père s’ajouta un embarras supplémentaire qu’il ne pouvait longtemps me dissimuler. Il m’annonça donc « je me suis endormi et j’ai cauchemardé. Je me suis pissé dessus…et y a pas un WC ou je puisse me changer … ». Je reconnais son trouble. Je suis garé en dépose minute. Je lui dis de monter dans la voiture et qu’il se changera en route ou chez sa grand-mère. Les sièges de mon Renault Scénic sont en cuir et ils ne craignent rien.


Il monte donc et enlève son bas de survêt noir et attrape un jean noir dans son sac car il veut être présentable en arrivant. Tout en s’exécutant, il meuble le silence qui se fait pesant. Je ne sais comment l’aborder cette fois et sans doute attribue t’il mon silence à mon embarras ou/et à ma tristesse. Il s’agit en fait plus d’une compassion. Je songeais en allant le chercher que c’est dur de ne pas avoir de père à 16 ans. Le mien était parti et je le reverrais aux obsèques de mon frère. Le sien l’avait laissé au même âge en ayant respecté son plan de vie et en lui offrant une chance de devenir footballeur en métropole.


Je lui dis que sa grand-mère ne souhaite pas venir en Guadeloupe et qu’il doit m’aider mais lui ne souhaite pas la forcer. Il semble comprendre sa position et témoigne de la description précise que lui avait faite son père des relations familiales et de leur historique. J’assiste donc impuissant à une effusion de larmes dans les bras de sa grand-mère et je me revois il y a quelques années pleurant dans les bras accueillant de ma mère. De longs instants nous restons là dans la cuisine ouverte à nous consoler et le consoler à la fois. Il s’agit de sa jeunesse qui s’achève déjà et de la mienne qui resurgit encore une fois. Je m’installe sur le sofa. Maman et Rony s’aperçoivent à peine de mon retrait. Et je revois les rivages de Guadeloupe où mes frères et moi faisions les 400 coups et aux ceux-ci me prenaient un peu pour leur souffre douleur.


Etais je différent parce que trop couvé, plus sensible ? Cette question que mon père avait tranchée, revint souvent dans les discussions ou les réflexions que j’entretenais au fil des ans. Nous en avions plusieurs fois parlé avec ma mère que je n’aurais jamais accusé d’avoir usé de trop de fibre maternelle et de m’avoir surprotégé. De m’avoir laissé porter mes couches nous portions les reproches des autres ensemble mais je m’en étais accommodé très bien. Développé une sexualité attenante au couche était mon affaire. D’ailleurs j’étais vraiment attiré par les garçons même sans couche.


Les plages de la Guadeloupe m’apparaissait en songe, aurais je le temps de les apercevoir dans ce voyage éclair qu’il me fallait organiser ?


Il faut faire vite et je prends contact avec l’agence de voyage de ma boite pour organiser ce voyage A/R sur 4 jours. Je ne peux faire plus compte tenu de mon agenda de fin d’année très chargé et des impératifs de production et du calendrier des matchs pour lequel Rony est attendu. Rony s’occupe de conditionner une valise avec le linge qu’il a pris à la volée et s’arrange pour faire réaliser une lessive à maman dans lequel il incorpore ses tenues de foot et son accident du train. Elle a l’habitude de ça. Ca tourne à 60° et elle n’examine pas plus que ça le linge sale que celui-ci lui ramène. Il plie ses affaires dans une valise que lui prête sa grand-mère pour que ses plus beaux habits n’arrivent pas froissés. Il constate avoir assez peu de vêtements de circonstances alors je lui propose d’inspecter ma penderie ce soir ou d’acheter quelque chose avant de décoller de Orly demain.


Il faut déjà prendre la route. C’est un déchirement pour maman, une épreuve qui s’accentue pour nous. Il va falloir affronter le deuil et sans doute pour moi un peu du passé. J’ai tort d’hésiter à laisser maman seule avec son chagrin, elle qui ne sait plus ou est sa place. Elle a finalement pu rattraper un peu de son histoire mais doit céder sa place de mère au premier rang du cortège de funérailles en raison de sa santé et de l’autre partie du monde. Elle nous étreint longuement tous les deux et me dis comme d’habitudes mais avec plus de résonance qu’à l’accoutumé « Fais attention à toi mon Fils ». Soyez forts je serais avec Vous, vous êtes la prunelle de mes yeux ajoute t’elle encore une fois par la fenêtre passager avant de laisser filer la voiture.


Rony éclate en sanglots encore une fois dés que nous attrapons la bretelle d’autoroute. Il ne faut pas que je laisse place au silence. Je lui proposais un chewing-gum ce qui aide à donner une constance. Je lui parle donc de notre île et petit à petit nous glissons de nouveau sur le deuil. Je lui explique comme en Guadeloupe la mort fait plus encore partie de la vie et comme l’hommage des vivants aux morts est puissant. A mesure que je lui parle je prends conscience aussi de ce que nous allons vivre. La veillée et les condoléances de tout le tissu local, le cortège, les cimetières carrelés en noir et blanc… je me souviens de celui de Morne a l’eau que beaucoup de touristes visites tant il est exceptionnellement beau. Cet perspective de l’hommage que nous pourrions rendre à son père le rassure, lui rappelle que je suis de sa famille et que nous portons en nous le même patrimoine. Il tente de m’expliquer comme il aimait son père et comme il aurait voulu lui dire encore et encore, comme il aimerait le remercier de l’avoir mis sur les rails qu’il voulait suivre et ce malgré les récriminations de sa mère qui s’opposait à faire de lui un footballeur.


La discussion ne tarissait pas. Sans doute souhaitait il me dire aussi qu’il est important de ne pas avoir de jugement définitif, savoir revenir sur les ressentiments. Il comprit que je savais lire entre les lignes aussi. Aucun scandale ne devait éclater pendant le deuil. Et j’ajoutais que sa mère voulait sans doute aussi le protéger en ne le poussant pas dans cette voie parce qu’elle savait que c’était un chemin pas facile et semé d’embuches. Ma mère à moi aussi avait cherché à me protéger elle aussi une génération plus tôt. Sans doute que l’apprentissage avait fait de notre propre enfance c’est qu’il n’était pas utile de mettre ses enfants dans du coton si on voulait en faire des hommes accomplis.


Christophe, son père disait souvent apparemment que « élever un enfant n’était pas le mettre dans la ouate ». Je souriais à l’énoncé de cette citation. Après un léger silence, j’ajoutais que chacun avait son programme et qu’il fallait sans doute mixer les points de vue et écouter au mieux ses enfants. Christophe avait apparemment le sens de l’écoute. Notre complicité s’installa pendant ce parcours de sorte que malgré le temps plus que maussade, le trajet nous paru rapide. Il était 22h00, il nous fallait trouver un Drive Mc DO et rapidement nous reposer pour rejoindre les Antilles le lendemain.


Lorsque nous arrivions à l’appartement, je trouvais un mot de la voisine qui me signaler qu’il y avait une fuite dans sa cave et qu’il fallait que je contrôle ma tuyauterie pour voir d’où cela provenait. Préoccupé par cette information, Rony prit seul possession du décor. Je posais les clés, vérifier les canalisations rapidement accessibles pendant que lui s’attablait pour ne pas manger froid.


La révélation


Déterminer l’urgent et l’important c’est ce que j’enseigne et conseille tous les jours. Pour autant on se fait tous piéger. Mon souci était comment partir pour une semaine alors qu’il y avait une fuite et personne pour intervenir. Et pendant ce temps Rony lui avait faim. Je finis pas le rejoindre en lui faisant par de mon problème. Tu as raison les fuites ne s’arrête jamais seule… ». Et il sourit. Je le pris au premier degré puis en mordant dans mon McTasty je me demandais à quoi il faisait allusion. Lorsque je débarrassais la table du reste de notre repas j’avançais sur un second degré probable. Rony avait jeté son chewing-gum dans la poubelle après l’avoir cherché sous l’évier et au dessus trônais mon change de la veille…


J’étais gêné mais pas autant que lui cet après midi sans doute. Nous terminions notre conversation sur la famille de façon générale et j’ajustais quelques détails que je ne voyais pas de la même façon que ce qui lui avait été expliqué. Il n’avait pas besoin de connaitre les frasques de son grand père mais il fallait qu’il sache que maman s’était retrouvée souvent seule avec ses enfants quand bien même elle était aidée par des employés en tant que femme du préfet.


La fatigue s’accumulait, je lui proposais de se coucher et que nous reprendrions notre conversation pendant le vol. 9h solidarisé à notre siège nous donnerait encore l’occasion d’apprendre plus l’un de l’autre. Je lui proposais de prendre le lit et que je dormirais dans le canapé mais il ne le voulait pas. « Je te laisse ta chambre tu as besoin de ton intimité… » La encore je ne comprenais pas mais ce fut plus évident pour moi lorsque je réalisais qu’en posant sa valise dans la chambre il avait aussi remarqué le paquet de change complet Tena que j’avais laissé ouvert à coté du lit. Il fallait aborder le sujet sans doute…


Il l’aborda pour moi « Tu trouves encore des couches à ta taille ?»

Bizarre comme question non ? Il aurait du commencer par tu portes encore des couches tout au plus ? Alors je lui dis que « oui que il y en a toujours eu dans les rayons et magasins spécialisés… »

« Mon père m’avait dit que ça n’existait plus que maintenant on ne trouvait plus que des culottes d’apprentissage et qu’il n’était pas utile que j’en porte le résultat était le même et qu’il fallait que ça cesse… »

Je reste bouche bée quelques instants. Le temps de comprendre ce que tout ça voulait dire. Rony avait du porter des couches tard lui aussi et c’est ce qu’il me confirme tout en cherchant le pantalon de survêt qui lui sert de pyjama dans son sac. Et l’accident de cet après midi n’avait rien d’exceptionnel.


« Cela m’arrive quelquefois de me pisser dessus en dormant et au club, je fais chambre commune avec un asiatique qui dit trop rien. Il parait qu’en Asie, il avait d’autre pote comme moi lorsqu’il était interne avant de venir jouer au foot en France. Mon père m’avait dit que tu avais du en porter jusqu'à 15 ans et moi j’en ai 16 et ça fait un an que j’en ai plus mis… quelques part ça me rassure que tu en portes encore. Je me sens moins seul. Peut être est-ce un peu génétique de ne pouvoir s’en passer…»


C’était le monde à l’envers. Moi qui ne savais comment l’expliquer il venait de me donner une leçon. Et nous nous sentions encore un peu plus proche. Rassurer de confirmer que nous étions bien de la même famille et que nous pouvions aimer le même confort. Tout de suite j’avais la compassion que j’aurai qu’on eut pour moi à l’époque et comprenait sa frustration de savoir que son père lui avait menti pour qu’il quitte cette habitude qu’il avait vécu chez moi. Jamais son père néanmoins n’avait rien dit avant ses 15 ans sachant que pour moi cela avait stoppé à cet âge. J’appris que son père lui parlait souvent de moi. Il lui disait que j’étais et resterait toujours son petit frère mais qu’avec l’âge l’adolescence avait pris le dessus et la vie nous avait séparé plus par connerie que par aversion.






Il avait admis avoir un frère qui fait pipi au lit même bien souvent dans son lit et il admettait que Rony dorme en couche lui aussi jusqu’au moment où cela était incompatible avec la vie, avec un gars qui joue dans un club de foot pour devenir professionnel,…Rony sans le savoir me faisait repartir dans mes souvenirs les plus enfouis mais sans doute aussi les plus chers. Effectivement Christophe acceptait que je vienne dans son lit même avec une couche pour faire un câlin, pour soulager mes petites peines, pour me calmer de l’orage et se rassurer sans doute aussi. Évidemment quand lui fut en âge de s’émanciper un peu, il faisait bande avec mes autres frères et puis pris le parti de mon père qui était l’homme providentiel (celui qui faisait vivre, qui représentait l’ordre et celui auquel on veut sans doute ressembler quand on est un petit mec. Je lui racontais tout ça dans ma version.


En retour je comprenais dans les propos de Rony que Christophe l’avait élevé aussi avec la mémoire de son petit frère. Je regardais Rony en me demandant jusqu’où allait la ressemblance et le mimétisme.


Puis un long silence s’installa dans la maison et dans nos têtes sans doute cela cogitait tout en nous brossant simultanément les dents. En sortant de la salle de bain, je sens Rony préoccupé alors qu’il s’installe sur le canapé. Je vérifie qu’il a suffisamment de couverture. Je lui dis « Bonne nuit » Il se redresse et je comprends qu’il attend qu’on se fasse la bise. Je m’exécute et j’ajoute alors « Dors bien » et je pars dans ma chambre. Je m’allonge et refais le fil de la journée. Je chasse le chat qui doit sentir qu’il y a de la charge émotionnelle. Je ne résiste pas au besoin de mettre une couche. Je suis fatigué et nous avons devant nous 8h de sommeil avant de rejoindre Orly et 9h de vol à la suite. Pourtant j’ai du mal à trouver le sommeil.


J’entends aussi Rony qui se retourne et se retourne. Et puis il y a mon chat qui s’invite sur le canapé avec lui et le surprend. Peut être aurais je du l’enfermer avec moi.


Rony se lève et avance dans l’obscurité vers la chambre. Devant le seuil de la porte il dit « Charlie, je veux dormir avec toi. Je peux pas dormir seul … ».

J’allume la lampe de chevet « Tu es sur ? »

« Oui, je ne veux pas rester seul… »


Je suis en teeshirt et ma couche sous la couette.

Derrière le chat continue de miauler. Je n’ai jamais vu « Tipunch » être si insistant après quelqu’un. « C’est son territoire, il n’est pas hostile. Il cherche un câlin ».

« Moi aussi j’en aurais besoin d’un. On me fait grandir trop vite et ça ne va pas s’arranger maintenant… »


Je me redresse Ti punch monte sur le lit et se niche entre mes cuisses. Rony est vêtu d’un bas de survêt court et d’un tee-shirt du PSG, on dirait qu’il a grandit avec tellement il semble usé. Dessous un tee-shirt blanc. Il s’assoit sur mon lit a son tour. Ces yeux luisent et se émotions le submerge. Je ne vois plus qu’une chose à faire accepter ses larmes et le laisser se blottir sur mon torse… quelques minutes passent avant qu’il se calme Il me tourne maintenant le dos car nos regards ne peuvent se croiser sans que les larmes ne le submergent.


Je lui caresse machinalement les cheveux comme me faisait ma mère quand j’étais petit. Il cherche avec sa main ma main pour que je l’enlace. Il bute sur ma couche puis la trouve et me dit entre deux sanglots « Papa s’endormait sur la canapé avec moi quand j’étais petit comme ça » Il respire fort puis reprend « L’année dernière encore c’est arrivé. J’ai compris ainsi que Papa ne pouvait plus dormir avec maman et maman quand elle nous trouvait endormis l’un contre l’autre, elle l’engueulait. Elle disait que Papa était une mère poule et qu’il faudrait que nous soyons « RAISONNABLES ». Je te le demande maintenant qu’est ce qui est raisonnable. Maintenant que je ne l’ai plus, je ne regrette aucun de ses moments que nous avons passés ensemble. Y’en a pas eu assez. Et je veux devenir un joueur de foot comme il en rêvait pour lui.


Je me contentais de répondre « Deviens qui tu es, Rony »


Un silence


« C’est pas facile … mais tu as l’air de t’être bien débrouillé toi finalement. Oui je vis dans le confort et j’assume mes choix de vie ou plutôt mon mode de vie m’impose des choix. Vivre à Paris, vivre seul. Ca n’a pas été facile non plus car mon père, enfin ton grand père, n’avait pas le temps de nous aimer et il aurait voulu que nous soyons ses soldats. Ta mamy ne le supportait pas et voulait me garder tendre et sensible. Je le suis moins car il vient un temps où la société t’oblige à grandir et te rappelle que la roue tourne tout de même. Tu dois t’assumer, avoir de l’argent pour vivre et non vivre pour l’argent et surtout ne jamais être vulnérable. Quelquefois être qui tu es te rend vulnérable pour les autres. Il faut donc un morceau de gris tout les jours pour revoir un peu de bleu plus tard. J’attends les moments ou je repars dans les iles ou vers d’autres latitudes. Et puis y a du bleu au quotidien c’est la tendresse quand je la trouve et au mieux c’est un peu de ma régression seule.


« C’est pour ça que tu mets des couches. C’est pour te retrouver seul et te ressourcer ? »

« Tu comprends vite gamin… »


« Dans ce cas tu comprends si je te demande d’en mettre une ? »

« Euh…oui je comprends mais … »

« Aller é é é,… promis j’en parlerais pas si c’est ça dont tu as peur… s’il te plait. »

« Si tu veux, j’en porte bien une. Je ne vois pas comment te refuser ça. »


Je me rendis compte alors qu’il avait juste à tendre la main pour mettre la main dans le paquet de change-complet dans lequel j’avais pris la mienne. Il la prend donc, la déplie. Il cherche l’interrupteur de la lampe de chevet. Regarde et ne comprend pas comment faire. Prenant le devant pour le derrière. Il se retourne et je vois son visage devenu radieux. Ses dents blanches ressortent, ses yeux noirs me fixent « Tu m’expliques ou tu me la mets Tonton Charlie? ».


« Bon, je tombe de fatigue je te lange mais après on dort. »

« Ok tu seras mon tonton adoré »

« Ah non me fait pas du tonton ça me donne un coup de vieux et puisqu’on sera tout les deux en couche..Allez allonge toi »

« Bah ça y est… »

« Euh oui… ».

Je le centre donc sur le lit. Relève son Tee-shirt du PSG et glisse son bas de survêtement et je comprends que je dispose de peu de temps avant que son sexe ne se dresse plus encore qu’il ne l’est après avoir m’avoir mis en main la couche qu’il a dépliée. Je sais que le fait même de prendre la couche peut m’exciter aussi. Je lui écarte les jambes, glisse la couche sous ses fesses. Je les devine très fermes. Je rabats les cotés pour bien placer celle-ci entre ses jambes. Je rabats enfin la couche sur son sexe rigide et je sers la couche au niveau de l’aine de sorte que les deux cotés se rejoignent presque. Sa taille 38 à peine est prise dans la couche que je termine de fixer au niveau de son nombril. Puis je rabats le surplus du plastique vers l’intérieur.



Il ne dit rien mais ses yeux luisent. Je ne peux m’empêcher de mettre la main sur le devant de la couche pour vérifier l’enveloppement parfait de la ouate autour de son membre de petit métis. Je tente de remonter son bas de survêtement alors il me dit « Laisse je reste comme toi. On dormira couche à l’air cette nuit « C’est trop bien »

« Bon éteint la lampe et on a 6h de sommeil devant nous… »


Silence


« Et si j’ai envie dans la nuit … »

« Allez chut… » Un peu de fermeté qui calme le jeu. Il me tire contre lui pour que je l’enveloppe de nouveau dans mes bras et pour sentir de la chaleur humaine. Je ne sais pas à quoi il pense moi je pense que je n’arriverais pas à dormir comme ça, puis à mon frère, nos respirations ralentissent…


Nous nous endormons.


Il est 8h et je me lève difficilement. La nuit a été agitée pour moi qui n’ai pas l’habitude de dormir avec quelqu’un à coté de moi sans le toucher. Rony semble avoir eu une nuit confortable mais je n’ose le réveiller encore. J’ai juste le réflexe de surveiller sa couche qui est restée blanche. Il dort sur le ventre et à embrasser le traversin. De mon coté c’est l’envie de pisser que j’ai assouvi machinalement dans mon lange qui m’a finalement décidé à me lever. Je vais vers la machine Espresso vêtu simplement de mon sous vêtement de nuit et de mon Tee-shirt.


La machine Espresso se met en branle et le filet de café qui se forme, la vapeur et l’arôme qui se dégage m’emmène dans une méditation de quelques secondes mais suffisante faire faire le vide

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« C’est dur d’être pédé à Paris ? ». Rony me ramène à la réalité en posant sa main sur le derrière de ma couche…


« Dit Homo ou Gay, c’est mieux… » « Warf c’est la même chose … répond moi !»


« On pense que ça l’est moins qu’ailleurs mais l’anonymat c’est aussi l’indifférence ou l’isolement au milieu de tous. La solitude peut être ton compagnon partout » « Pourquoi tu me dis ça… »

« Parce que les mecs de ma génération semble plus cool avec ça mais que depuis que je suis en Normandie et dans le Foot ça me semble moins simple d’assumer… »

« Tu penses être homosexuel ? »

« Non je pense être pédé. J’adore voir les autres dans les vestiaires et avec Tonin on aime se branler » …


Bientôt :


Des nouvelles de Rony,


« Salut Tonton, (sale gosse)


Voila plusieurs mois que je n’avais plus de ses nouvelles et voila que mon neveu ressurgit au courrier de ce matin. Je le savais dans un centre de formation de football dans un club prestigieux d’Europe et ni ma vie ni la sienne ne trouvèrent de moments de répit suffisant pour nous revoir…


Tonton Charlie, (eh oui…)


Je profite que je passe à la maison pour te donner des nouvelles. Ne m’en veux pas pour être resté silencieux après notre voyage en Guadeloupe mais j’ai préféré oublier un peu et profiter de la vie. Tu me l’avais d’ailleurs conseillé « fait tes expériences sans te soucier de ce que les autres en disent et donne toi les moyens d’assumer qui tu es loin des « qu’en dira t’on » et des médias.


C’était aussi une façon de rendre hommage aux investissements de mon père que de me donner à fond pour devenir un bon footballeur. Mais, sans doute l’as-tu appris, j’ai du arrêté à cause d’une grave blessure au genou. Je suis actuellement en convalescence à Nantes chez Maman. Elle m’amène deux fois par semaine au centre de Thalasso du Pornic pour rééduquer mon genou et si les choses rendre dans l’ordre je devrais faire un Test à Liverpool cet été qui me dira si je peux poursuivre ma carrière sportive. J’ai pas mal peur mais le moral est meilleur qu’à Noël (déjà 6 mois que je ne joue plus) juste après l’opération. J’avais été contraint de rester à l’hôpital de Londres pour les fêtes…

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2 Comments


michel bihan
michel bihan
Mar 07, 2021

bien belle histoire, a suivre sans doute

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Danette
Danette
Mar 07, 2021
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Oui car je vois toujours le neuveu qui joue au foot pas très loin de chez moi et vient de temps en temps

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